Depuis le 1er juillet dernier, il est exigé de chaque collègue en attente d’un véhicule de fonction de signer la “Charte du conducteur” avant même de le réceptionner, sauf que, nous allons le démontrer, cette charte n’offre en l’état pas la moindre valeur juridique.

En effet, un règlement intérieur, ses annexes et les notes de service qui le complètent éventuellement ne peuvent être opposés au salariés sans l’accomplissement préalable par l’employeur d’un certain nombre d’obligations et notamment d’une information-consultation auprès du Comité social et économique central (CSEC) prévue par l’article L.2312-8 et d’une transmission à la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS). Ceci conformément à l’article L.3121-4 du Code du travail.

Sont donc parfaitement inopposables au salariés bénéficiaires d’un véhicule de fonction les mentions évoquant “une procédure disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement” en cas de non respect de telle ou telle disposition.

De plus, la menace de faire participer aux frais le conducteur qui se serait rendu coupable d’un “mauvais entretien”, s’avère clairement et sans aucune ambiguïté possible, illicite : sauf en cas de faute lourde, situation heureusement marginale, un salarié ne peut voir sa responsabilité pécuniaire engagée, pas plus qu’il ne peut être appelé à participer financièrement à des réparations. Au sujet de cette clause illicite, rappelons l’interdiction formelle par le législateur de toute sanction financière. Idem d’ailleurs pour la mention (page 7, annexe 1) prévoyant une imputation au collaborateur des majorations d’amendes. Interdit !

Pour aller un peu plus loin

Selon les situations prises en compte, les chartes peuvent se classer dans l’une des trois catégories suivantes
– soit elles comportent uniquement des dispositions qui relèvent du règlement intérieur (santé, sécurité, discipline) et elles doivent faire l’objet d’une information-consultation du CSE au titre de l’article L1321-4 du Code du travail.
– soit elles ne comportent que des clauses étrangères au règlement intérieur, qui sont plutôt un instrument de gestion de l’entreprise, auquel cas le CSE doit être informé et consulté au titre de sa compétence générale en application de l’article L2312-8 du code du travail.
– soit ces chartes comportent des clauses qui relèvent du règlement intérieur, et des clauses qui n’en relèvent pas (des chartes dites mixtes) et dans ce cas elles doivent faire l’objet d’une double consultation du CSE (L1321-4 et L2312-8 du code du travail).
En l’espèce, dans la mesure où la charte sur l’utilisation des véhicules ne comporte pas que des dispositions qui entrent dans le champ du règlement intérieur, le CSE doit être informé et consulté au titre de sa compétence générale (L2312-8 du code du travail) et au titre de l’article L1321-4.
Cette double consultation n’ayant pas été réalisée, nous nous trouvons sans doute face à un délit d’entrave.

Pour conclure

Pour demeurer très opérationnel et concret, retenons simplement aujourd’hui que signée ou non, cette Charte du conducteur demeure en l’état parfaitement inopposable et ne peut donc être invoquée pour la moindre sanction, pécuniaire ou autre.

6 Commentaires

  1. et bien au moins ceux qui ont signé pour avoir la carte total savent qu’ils n’ont rien à craindre .. et au cas où il vaut mieux adhérer à la Cfe-cgc !!

  2. Depuis le passage de l’AEN à 40%, n’y a t’il pas un problème de RGPD s’agissant des pleins réalisés en dehors des heures de travail et des lieux où ils sont effectués ?
    Mes déplacements personnels ne concernent que moi et l’entreprise n’a rien à en connaître.
    Pourriez-vous éclaircir ce point lors d’un prochain CSE svp ?
    D’autre part, mon manager m’indique qu’il faut réduire les déplacements… il s’agit des déplacements pro… que faut-il entendre dans la réponse « Tout les déplacements ! »
    Merci pour ce blog

  3. Vous êtes les seuls à nous donner toutes ces infos et pour ça un grand merci !
    Continuez c’est apprécié d’après ce que j’entends autour de moi et je vous fais pas mal de pub
    Peut-être un jour une adhésion ???

    • Merci de ton commentaire Mylène. Nous continuerons à informer autant et aussi souvent que possible comme nous le faisons quotidiennement depuis 18 ans. Pour l’adhésion, c’est quand tu veux et je pense que c’est la meilleure décision à prendre dans le contexte actuel.
      Arnaud

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