Dans votre livre, vous critiquez la position du Medef, dont vous avez également démissionné, sur les questions de l’emploi. Que lui reprochez-vous ?
Les questions économiques liées à l’emploi n’entrent pas dans les problématiques du Medef. On y parle de l’allègement des charges mais certainement pas du développement de l’emploi en France. Or, je pense qu’on ne peut pas parler de l’entreprise sans interroger sa responsabilité sociale.
Vous évoquez aussi la critique constante de l’Etat dans les discours patronaux.
On a l’habitude d’opposer la libre entreprise et la sphère publique. Or, si l’Etat n’existait pas, les entreprises disparaitraient et vice versa.
N’y a-t-il pas de plus une contradiction entre ce discours et la réalité des relations entre le patronat et l’Etat ?
Effectivement, les grandes entreprises françaises sont bien souvent dirigées par des anciens fonctionnaires, malgré la fiction qui voudrait qu’il y ait une incompatibilité entre ces deux mondes. On retrouve, comme en Russie, une nomenklatura qui évolue à la fois dans le public et dans le privé.
Mais vous-même, énarque parti dans le privé, ne faites vous pas partie de cette nomenklatura ?
Exactement. Et c’est pour cela que je m’estime légitime pour en parler. Je connais mon sujet et je ne déverse pas tout mon fiel.
Toujours dans votre livre, vous estimez que c’est l’Etat qui décide de tout dans les organismes paritaires. Est-ce un constat d’échec du paritarisme ?
Il est de notoriété publique que, dans un paritarisme à trois avec l’Etat, les grandes décisions sont prises unilatéralement par l’Etat. Il faut donc se poser la question de l’avenir de la Sécurité sociale, cet édifice construit en 1949. Patronat et syndicats y siègent car l’assiette du financement de la Sécurité sociale est limitée aux revenus du travail. Faut-il continuer comme cela ? Personnellement, je suis pour une révolution fiscale : c’est au contribuable de financer la protection sociale en fonction de ces capacités. Il faudrait donc passer par l’impôt progressif et non par les cotisations, qui se révèlent régressives : moins on gagne, plus on paie proportionnellement.
Vous préconisez donc la fin du paritarisme dans la protection sociale ?
Sincèrement, personne ne s’en apercevra. Aujourd’hui, c’est par exemple l’Etat, donc le contribuable, qui offre sa garantie au versement des retraites. On ne peut pas rester dans l’illusion d’un système sans intervention du contribuable.
 La démission de l’Apec

Président de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) depuis juin 2009, Eric Verhaeghe a démissionné le 12 janvier 2011, alors que l’Apec se trouve dans un moment charnière. Depuis quelques années, en plus de sa mission de service public, elle a développé des activités commerciales sur le terrain d’entreprise privées telles que les sociétés d’emploi temporaire. Cette situation, problématique au regard du droit européen, conduit les partenaires sociaux à s’interroger sur son avenir. En juillet 2010, Eric Verhaeghe a proposé au Medef de filialiser les activités concurrentielles. “J’avais alors prévenu que si je n’étais pas suivi, je démissionnerai”, assure-t-il. Or, l’organisation nationale préfère cantonner l’Apec dans ses seules activités de service public. Eric Verhaeghe quitte en même temps tous les mandats qu’il occupait pour le Medef aux conseils d’administration de l’Agric, l’Acoss, l’Unedic, la Cnav et à Pôle emploi.

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