Article relevé sur Le Moniteur.fr :
Les pratiques addictives, facteurs aggravant le risque
d’accident, sont devenues l’affaire des entreprises. Pas toujours simple
tant la frontière est ténue entre vie professionnelle et vie privée.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. D’après une étude de l’Inpes
(1) de 2012 sur les consommations de substances psychoactives en milieu
professionnel, le BTP arrive en tête pour l’alcool. Ainsi, 32,7 % des
actifs du secteur boivent six verres ou plus, lors d’une même occasion,
au moins une fois par mois. Contre 19,2 % des actifs tous secteurs
confondus. Certes, trinquer est une tradition dans le BTP. « Les
événements à fêter ne manquent pas : première pierre, réception du
chantier, signature du contrat, départ à la retraite… », admet Fabrice
Leoni, directeur prévention santé sécurité de Bouygues Entreprises
France-Europe. Mais à en croire un rapport de l’Inspection générale des
affaires sociales (Igas) de juillet 2013, le travail en plein air, les
postures pénibles et le port de charges lourdes favoriseraient la
consommation d’alcool au travail. L’usage du cannabis s’avère également
plus fréquent dans la construction (13 %) qu’ailleurs, si l’on excepte
le secteur des spectacles (16,6 %).

De nouveaux cannabinoïdes de synthèse

« Or ces dernières années ont vu l’avènement de nouveaux
cannabinoïdes de synthèse », alerte Jean-Pierre Goullé, professeur de
toxicologie à l’université de Rouen. Avec de graves conséquences
sanitaires. La consommation de ces nouvelles substances, devenues très
puissantes, peut désormais provoquer le décès par surdose. «
Contrairement aux idées reçues, le cannabis n’est pas une drogue douce !
D’où la nécessité d’informer les salariés de ces dangers. » Le plus tôt
possible. « Nous nous efforçons ainsi de sensibiliser nos apprentis dès
leur journée d’accueil : ils sont bien plus concernés car, moins
lucides sur ses effets, ils sous-estiment les risques sur le chantier »,
rapporte Céline Pomathiod, DRH du groupe de BTP Floriot. La prise de
médicaments peut également poser problème. « Certains d’entre eux
peuvent provoquer, sur le terrain, des risques similaires à d’autres
substances comme la somnolence et la baisse de vigilance », relève
Hugues Decoudun, directeur prévention chez Colas. « En nous penchant sur
le sujet des addictions, en 2008, nous nous sommes aperçus que la prise
d’une substance de type alcool ou drogue était impliquée dans presque
100 % de nos accidents mortels », témoigne de son côté Fabrice Leoni.
Sujet certes délicat pour son lien avec la vie privée, le phénomène des
conduites addictives regarde le chef d’entreprise, tenu d’une obligation
de résultat en matière de santé et de sécurité. Mais face à la
complexité du sujet, l’employeur peut se sentir démuni. Colas a ainsi
distribué une « boîte à outils » à ses chefs d’agence : rappel de leurs
droits et devoirs, outils de sensibilisation, informations sur les
formations disponibles, etc. Pour éviter la prise de poste sous
l’emprise d’une substance psychoactive, certaines entreprises recourent
au dépistage. Mais la question reste posée de la nature du test
salivaire, destiné à révéler l’imprégnation au cannabis : simple test ou
acte biologique nécessitant le concours d’un professionnel de santé ?
La Direction générale du travail recommande en tout cas l’intervention
de la médecine du travail. Pas si simple, pour Hugues Decoudun. « Cela
met les médecins dans une position délicate. Nous revendiquons
d’ailleurs, pour nos salariés travaillant sur la voie publique ou dans
des conditions dangereuses, les mêmes moyens de contrôle préventif en
matière de drogue que les entreprises de transport public. »

Déceler les attitudes « à risque »

Les relais managériaux jouent par ailleurs un rôle essentiel
pour donner l’alerte. C’est pourquoi le groupe Ramery a proposé à ses
chefs de chantier et conducteurs de travaux des formations pour les
aider à détecter les comportements anormaux. GTM Bâtiment, de son côté,
ne procède pas aux tests de dépistage. « Nous préférons la
sensibilisation », assure sa DRH, Sylvie Lloret, qui note « un
changement de comportement par rapport à la consommation d’alcool »
depuis le lancement de la démarche, en 2009. L’entreprise propose aussi
des prises en charge aux salariés en difficulté avec l’appui d’un
cabinet spécialisé. Sur trois essais, « deux belles réussites ». « Mais
nous souhaiterions plus de fluidité dans les remontées d’information
pour déclencher l’aide. » Solidarité dans les équipes oblige, il est
souvent difficile de « faire tomber l’omerta ». Et quid des intérimaires
? Dans le cadre d’un accord sur la prévention signé avec Bouygues
Construction en 2011, trois majors du travail temporaire se sont
engagées à renforcer la sécurité de leurs personnels, notamment la
prévention des comportements addictifs. « D’après l’Inpes, 25 à 30 % des
compagnons intérimaires âgés de moins de 30 ans sont concernés par les
conduites addictives », pointe Fabrice Leoni. Chaque intérimaire est
ainsi informé qu’il peut faire l’objet d’un test. « Reste la question de
l’addiction au travail ou workaholisme », soulève Michel Ledoux,
avocat. On peut déduire d’une jurisprudence récente, notamment dans une
affaire concernant un cadre victime d’un malaise cardiaque, qui
travaillait 71 heures par semaine, que l’employeur ne doit pas se
contenter de contrôler la charge de travail de son salarié. « Il doit
aussi le protéger contre lui-même ! »
Source : Le Moniteur.fr 

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5 Commentaires

  1. Sujet préoccupant et délicat en effet.
    Dans un tout autre registre, pourquoi ne perçoit on plus de participation aux bénéfices? La presse suisse nous donne la réponse via le Journal du Jura:
    Le directeur d'Adecco a perçu 6,07 millions de francs en 2013

    Le directeur général d'Adecco Patrick De Maeseneire a perçu, en 2013, une rémunération totale de 6,07 millions de francs. Ce montant comprend notamment un salaire de base de 1,8 million et un bonus annuel de 1,71 million.

    En d'autres termes: si tu en prends d'un côté, tu peux pas en donner de l'autre…
    (ats) Le reste est composé d'actions bloquées durant un certain temps et tirées du programme de rémunération à long terme ainsi que de paiements à la caisse de pension. Au total, la direction du groupe, forte de douze membres, a perçu 25,8 millions de francs.

    Ces chiffres ressortent du rapport annuel publié par le numéro un mondial du travail temporaire, basé à Chéserex (VD). En 2012, le directeur général avait gagné 5,9 millions et la direction un total de 28,5 millions.

    L'an dernier, Adecco a réalisé un chiffre d'affaires de 19,5 milliards d'euros (23,8 milliards de francs) et un bénéfice de 557 millions d'euros.

  2. Au vue du taux de conversion de l'euro au franc de l'article ci-dessus, je n'y prêterai que peut de légitimité. Certainement mal recopié et sans les sources…
    Mais bon ça fait combien 25,8M€ divisé par 3500 salariés ?
    Les intérimaires ont leurs IFM…
    😉

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