Le délit du travail dissimulé est
constitué et l’intention de dissimuler les heures supplémentaires
effectuées par le salarié est prouvée dès lors qu’il est établi que
l’employeur ne pouvait ignorer la quantité des heures effectuées par le
salarié (Cass. Soc. 05.04.2018 : n°16-22599 ; 16-16573).



Définition du travail dissimulé :



Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour l’employeur de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement (c. trav. art. L. 8221-5 ; Cass. soc. 23.10.2013, n° 12-13899) :



– de certaines formalités telle la déclaration préalable à l’embauche (cass. civ., 2e ch., 21 septembre 2017, n° 16-22307), la remise des bulletins de paie avec mention du nombre d’heures de travail réellement accomplies ;



– des déclarations relatives aux
salaires ou aux cotisations sociales auprès des organismes de
recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de
l’administration fiscale.



Le contentieux afférent au travail dissimulé se retrouve de manière presque systématique (pour ne pas dire, automatiquement)
en cas de contestation prud’homale de la durée de travail et des heures
supplémentaires effectuées par un salarié qui en réclame le paiement,
avec les majorations qui doivent s’y appliquer.



C’est ainsi que le délit de travail
dissimulé est bien constitué lorsque l’employeur a, de manière
intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d’heures de
travail inférieur à celui réellement effectué (c. trav. art. L8221-5 ;
Cass. Soc. 20.10.2015 : 14-82433).



Les heures supplémentaires sont des heures de travail accomplies au-delà de la durée légale du travail ou de la durée considérée comme équivalente (c. trav. art. L. 3121-28).



Les heures supplémentaires sont effectuées à la demande de l’employeur (cass. soc. 24 février 2004, n° 01-46190).



La rémunération des heures supplémentaires est majorée (c. trav. art. L. 3121-36) :



– de 25 % pour les 8 premières heures supplémentaires (de 35 h à 43 h) ;



– de 50 % pour les heures supplémentaires suivantes (au-delà de 43 h).

Les sanctions du travail dissimulé 



Les sanctions en cas de travail
dissimulé juridiquement constaté sont très lourdes pour l’employeur et
elles sont de plusieurs ordres.



Il existe des sanctions de nature pénale et des sanctions destinées directement au salarié qui s’estime victime de travail dissimulé.



Ainsi, l’employeur coupable encourt des amendes et peines de prison : 3 ans d’emprisonnement et 45000  d’amende.



En outre, l’employeur, en tant que personne physique coupable de l’infraction de travail dissimulé, encourt les peines complémentaires suivantes (c. trav. art. L. 8224-1 et L. 8224-3) :



– l’interdiction d’exercer,
définitivement ou temporairement (maximum 5 ans), l’activité
professionnelle dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction
a été commise ;



– la confiscation des objets sur lesquels le travail dissimulé a porté ;



– l’exclusion des marchés publics, définitivement ou temporairement (maximum 5 ans) ;



– l’interdiction des droits civiques, civils et de famille ;



– l’affichage et la publication de la décision prononcée par le tribunal.



Il est également prévu une indemnisation du salarié victime de travail dissimulé.



Ainsi, le salarié auquel un employeur a
eu recours sans être déclaré a droit, en cas de rupture de la relation
de travail, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire, à
moins que l’application d’autres règles légales ou conventionnelles ne
conduise à une solution plus favorable (c. trav. art. L. 8223-1 ; Cass.
soc. 26 novembre 2015 n° 14-17976).



Cette indemnisation est due quel que soit le mode de rupture du contrat de travail (Cass. soc. 07.11.2006, n° 05-40197).



Sans rupture du contrat de travail, l’indemnité pour travail dissimulé n’est pas due (Cass. soc. 02.03.2016, n° 14-15611). 



En cas de transfert de contrat de
travail, c’est le nouvel employeur qui doit verser l’indemnité pour
travail dissimulé, en application de l’article L 1224-1 du code du
travail (Cass. Soc. 11.05.2016 : n°14-17496).



L’indemnité forfaitaire se cumule avec toutes les indemnités de rupture du contrat, c’est-à-dire avec :



– l’indemnité pour licenciement sans
cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 12.01.2006, n° 03-46800), y compris
après une prise d’acte de la rupture du contrat de travail produisant
les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc.
18.02. 2015, n° 11-10892) ;



– l’indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement (Cass. soc. 12.01.2006, n° 04-43105) ;



– les dommages et intérêts pour violation de l’ordre des licenciements (Cass. soc. 12.01.2006, n° 04-41769) ;



– l’indemnité compensatrice de préavis
et l’indemnité compensatrice de congés payés (Cass. soc. 12.01.2006,
n° 04-40991 et 04-42190) ;



– l’indemnité de licenciement, légale ou
conventionnelle (Cass. soc. 06.02.2013, n° 11-23738 ; Cass. soc.
11.05.2016, n° 10-30325), sachant qu’auparavant, le cumul n’était pas
permis, le juge accordant la plus élevée des deux.



Le salarié peut également prétendre à des dommages et intérêts destinés à compenser les conséquences dommageables du défaut de déclaration aux organismes sociaux,
en particulier pour les droits à l’allocation de chômage et les
indemnités journalières de sécurité sociale (Cass. soc. 14 avril 2010,
n° 08-43124).



La preuve de l’élément intentionnel du délit de travail dissimulé



Selon une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, le caractère intentionnel de la dissimulation du nombre d’heures de travail effectuées doit être prouvé.



Son appréciation relève du pouvoir
souverain des juges du fond (Cass. Soc. 14.octobre 2015 : n°14-12193).
La Cour de cassation vérifie systématiquement que cette appréciation des
juges du fond repose sur des éléments suffisants (Cass. Crim :
20.10.2015 : n°14-82433).



Comment apprécier l’intention de l’employeur de dissimuler les heures de travail du salarié ?



La Cour de Cassation, par plusieurs
arrêts récents, a identifié les cas dans lesquels une intention de
dissimulation de travail peut être établie et les cas dans lesquels il
n’en est rien.



Ainsi le caractère intentionnel est établi dans les circonstances suivantes :



– lorsque l’employeur ne pouvait pas ignorer la quantité des heures effectuées par un salarié,
soumis à une convention de forfait jours alors qu’il était inéligible à
ce dispositif, au regard de l’objet même de son activité, de la petite
taille de l’entreprise et de l’envoi de messages le soir et le week-end
(Cass. Soc. 05.04.2018 : n°16-22599) ;



–  lorsque l’employeur avait connaissance, du fait de la petite taille e l’entreprise, du nombre d’heures qu’il faisait effectuer à un salarié qui exécutait un temps plein alors qu’il était titulaire d’un contrat à temps partiel (Cass. Soc. 05.04.2018 : n°16-16573)



En revanche, le caractère intentionnel ne peut se déduire :



–  de la seule application d’une convention de forfait illicite (Cass. Soc. 28.02.2018 : n° 16-19060)



– de l’absence de production par
l’employeur d’éléments de nature à faire la preuve des heures effectuées
(Cass. Soc. 14.03.2018 : n°16-13541) ;



– du seul relevé de badgeage
produit par le salarié, non soumis au pointage, enregistrant les heures
d’entrée et de sortie du site. Il importe peu que l’employeur ne
fournisse aucun élément de nature à justifier les horaires effectués et
qu’il soit condamné à payer le nombre d’heures supplémentaires non
rémunérées allégué par le salarié (Cass. Soc. 14.03.2018 : n°16-12171).



On le comprendra : le contentieux des heures supplémentaires et du travail dissimulé n’est pas aisé et il reviendra aux parties de rapporter la preuve de leurs allégations.



En effet, en matière d’heures
supplémentaires, si la preuve des heures de travail effectuées n’incombe
spécialement à aucune des parties, il appartient néanmoins au salarié
de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer se
demande (c. trav. art. L 3171-4) (Cass. Soc. 25.02.2004 : n°01-45441 ;
Cass. Soc 22.09.2010 : n° 08-43113).



Viendra ensuite à prouver le caractère intentionnel du travail dissimulé.







Sources :



Cour de cassation, chambre sociale, arrêts du 5 avril 2018, RG n°16-22599 ;n° 16-16573



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 28 février 2018 : RG n° 16-19060



Cour de cassation, chambre sociale, arrêts du 14 mars 2018 : RG n°16-13541 ; n°16-12171



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 23 octobre 2013, RG n°12-13899



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 20 octobre 2015, RG n°14-82433



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 26 novembre 2015, RG n° 14-17976



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 7 novembre 2006, RG n° 05-40197



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 2 mars 2016, RG n° 14-15611



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 12 janvier 2006, RG n° 03-46800



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 18 février 2015, RG n° 11-10892



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 12 janvier 2006, RG n° 04-43105



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 12 janvier 2006, RG n° 04-40991 et 04-42190



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 6 février 2013, RG n° 11-23738



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 11 mai 2016, RG n° 10-30325



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 24 février 2004, RG n° 01-46190



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 25 février 2004 : RG n°01-45441 ;



Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 22 septembre 2010 : n° RG 08-43113


Source : Juritravail

1 COMMENTAIRE

  1. C'est ce que risquait Adecco avant de mettre en place son outil informatisé ! Ce n'est donc pas pour payer les collaborateurs comme il se doit ?

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