Ce matin, en passant devant la porte derrière laquelle se tenait le CODIR, j’ai un instant crains le pire en entendant quelques détonations sèches. Je savais que les résultats paraissaient aujourd’hui et j’ai redouté que l’un ou l’autre de nos dirigeants n’ait commis l’irréparable en apprenant une quelconque catastrophe financière. Le cas s’est souvent vu. Heureusement je fus vite rassuré en comprenant que ce n’était que le claquement des bouchons de Champagne et que l’on arrosait sans trop de modération un évènement d’importance.
Ce n’étaient qu’exclamations, fous rires, enjouement et même chansonnette poussée par une voix féminine qu’il m’a semblé reconnaître. Puis s’enchaînèrent calembours, gloussements coquins et rires gras jusque tard dans l’après-midi. Quel pouvait être l’objet d’une telle liesse dans les très fonctionnels sinon austères locaux de l’entreprise ?
J’ai vite compris en lisant la presse du jour : les résultats Adecco France venaient effectivement de paraître et ils sont non seulement satisfaisants mais même excellents ; “supérieurs aux attentes tant pour son quatrième trimestre que pour l’année écoulée” comme les commente Reuters. Pensez un peu, le groupe a enregistré un bénéfice net de 141 millions d’euros au quatrième trimestre 2010 contre 42 millions un an plus tôt. Le chiffre d’affaires, lui, a progressé de 17%.
Survitaminés et dopés par ces résultats, nos dirigeants annoncent une forte croissance pour les mois à venir.  On va voir ce qu’on va voir. Quant aux actionnaires, rétribués à 0.75 CHF l’an dernier, les milieux financiers leur prévoyaient une hausse à 0.90 CHF, ce qui aurait déjà représenté une confortable hausse. Un peu timorés ces milieux financiers puisque le conseil d’administration  proposera à l’assemblée générale de verser carrément un dividende de 1.10 CHF.
Toujours dans les bonnes nouvelles et question cotation, UBS a ajouté le titre à sa liste des sociétés préférées en Europe. Bref, on nage dans le bonheur et l’opulence.
Et les salariés dans tout ça ? Motus et bouche cousue. Apparemment rien n’est prévu. Macache, oualou et peau de zébi. Vous repasserez !
La CFE CGC se félicite des résultats obtenus par une gestion rigoureuse et surtout par les efforts au quotidien des salariés permanents mais aussi par l’engagement de nos salariés intérimaires. Il vaut évidemment mieux travailler pour une entreprise qui gagne de l’argent, cela n’est pas discutable, mais à quoi servent les performances économiques si elles ne profitent pas à tous ? Sous-effectif, stress et parfois découragement finissent par miner les plus vaillants des salariés.
Et puis comment ne pas penser aux centaines de salariés qui ont quitté l’entreprise ces derniers mois ? Combien sont aujourd’hui dans des situations difficiles ? La performance, oui, très bien, mais à quel prix ? Pour qui ? Jusqu’où ? Comment ? Se poser, même occasionnellement, ces quelques questions ne sera jamais inutile.

1 COMMENTAIRE

  1. Encore une fois le même refrain… la même rengaine… la même chansonnette poussée par certain(e)s !!! Et nous, dans tout ça…. les mains dans le gasoil, à dire à nos clients que nos marges se réduisent… et qu'il faut ABSOLUMENT compenser et revaloriser pour continuer à vivre… mais à faire vivre qui d'ailleurs ???? De notre côté, je parlerais plutôt de survivre… Si tout le bateau est dans la tempête et que les capitaines se mouillent, ça ne me dérange pas de sortir les rames, mais quand on a le sentiment d'être dans la galère, que nous sommes les seuls à souquer et que les autres ripaillent dans le carré de commandement ou au sémaphore politico-démago-actionnario helvétique… cela me donne juste la volonté de me révolter contre ce système !!

    Un directeur d'agence qui se bat au quotidien pour défendre son salaire, celui de ses collaborateurs et jusqu'à présent son entreprise… avant que le bateau ne finisse par chavirer, à force de capitaines bien trop omnubilés par leurs desseins aurifères !!!!

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