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Nous avons plusieurs fois évoqué plus ou moins directement le sujet de la digitalisation de l’économie et de ses conséquences. Le thème de la digitalisation est très tendance en ce moment et malheur à celui qui s’avise d’émettre le moindre doute, la moindre réserve sur le sujet car, immédiatement, il se verra suspecté d’être un tenant de la décroissance, un nostalgique de l’ère néolithique ou un partisan du boulier et du papier-crayon. Le ringard, le cacochyme exemplaire, le troglodyte honteux s’en trouvera immédiatement discrédité à jamais. Il faut, sans hésitation et avec enthousiasme si possible, chanter à l’unisson les vertus de la digitalisation intégrale et s’incliner devant les nouvelles idoles Big Data, Cloud et Machine Learning. Nous traiterons donc le sujet avec toute la prudence et le respect qui siéent... D’ailleurs, le “tout-écran”, le “tout-clavier”, pourquoi pas mais, en ce qui concerne notre rôle de représentant du personnel, se pose quand même une question essentielle : qu’en sera-t-il des emplois forcément sacrifiés ?

Concernant notre profession, nous avions, il y a plus d’un an, dans le l’article “Le DRH de l’un des majors de la profession annoncer la fin des réseaux d’agences et des relations physiques“, abordé le sujet de la disparition d’une grande partie des agences de travail temporaire en nous contentant de citer les propos du DRH chez Manpower. Celui-ci, visiblement très en verve, s’était lâché, un peu tôt sans doute, en annonçant dans un quotidien économique à grand tirage (Les Échos), la fin des réseaux d’agences d’intérim. Pas sûr que les états-major des trois principaux acteurs de la profession ait apprécié cet aveu intempestif et un peu précoce.
Au Forum de Davos, en janvier dernier, le gratin de la grande industrie et de la finance internationale avait communié dans une même volonté partagée de digitaliser au plus vite l’ensemble des activités économiques. Horizon indépassable de la croissance et de la modernité tout à la fois, la digitalisation porterait, selon nos élites, les promesses d’une réduction drastique des coûts en même temps et corrélativement que d’un rapide accroissement des profits. Qu’on se le dise. Mais il se trouve que l’organisateur de ce même Forum, président du World Economic Forum, un certain Klaus Schwab, avoue quand même que la numérisation à venir détruira au moins cinq millions d’emplois en Europe dans les cinq prochaines années, ce qui n’est pas rien. Chiffre très en-deçà d’ailleurs d’autres études envisageant froidement la disparition de trois millions d’emplois pour la seule France… Il précise par ailleurs :”Sans une action urgente et ciblée dès aujourd’hui pour gérer cette
transition à moyen terme et créer une main d’œuvre avec des compétences
pour l’avenir, les gouvernements devront faire face à un chômage en
hausse constante et à des inégalités”. Voilà qui limite la portée des sempiternelles litanies et promesses électorales sur la lutte contre le chômage des jeunes, des vieux, des autres et du reste.
Big Data, le cloud, la digitalisation et les machines apprenantes devraient, selon des études qui se multiplient, littéralement laminer les classes moyennes tenantes de fonctions administratives, d’encadrement, liées à la relation clients et même juridiques…
Tandis qu’une douce mélodie évoque la formidable opportunité, la chance à ne pas manquer, l’automatisation de tâches ingrates et fastidieuses et, de manière générale, un avenir radieux dans le monde du travail, la véritable motivation de nos dirigeants serait plutôt à chercher du côté de faramineux gains de productivité, de l’ordre de plusieurs dizaines de milliards d’euros. Les grands groupes préparent activement, plus ou moins en sous-main, le remplacement d’une bonne partie de leurs effectifs par des projets informatiques d‘envergure inédite, se chiffrant à plusieurs centaines de millions d’euros pour les plus importants. A titre d’exemple, les banques ont déjà supprimé 600 000 emplois dans le monde et n’en sont qu’au début du processus. HSBC a annoncé la suppression de  25 000 emplois avant 2017 ; la Deutsche Bank 26 000 avant 2018. La Société Générale a déjà supprimé elle-même des milliers d’emplois et nombre d’opérations bancaires sont désormais automatisées. Il ne s‘agirait que des prémices de la digitalisation…

Randstad lance la prestation 100% numérique

Randstad sera donc le premier géant du travail temporaire à avoir abattu ses cartes avec une campagne de lancement dont les slogans ne peuvent prêter à équivoque : “Service de recrutement 100% en ligne pour les TPE et PME”. Nous vous invitons vivement à visiter leur site Randstad Direct. Ceci dit, passé l’effet de surprise, rien de bien surprenant et lorsque l’on voit les performances de certaines plateformes de type Uber ou les supports informatiques des réseaux sociaux, il est difficile de ne pas se projeter sur une prochaine relation directe clients/intérimaires. Après les TPE et les PME, cible identifiée par notre concurrent et après une phase de rodage, s’ensuivra forcément une quasi-généralisation de la démarche à l’ensemble de la clientèle. Une bonne ergonomie de la plateforme et un service SAV en ligne (Chat, téléphone…) de qualité et le tour sera joué, le client n’ayant finalement qu’à ouvrir un compte avec identifiant et mot de passe. Mais quid des recruteurs surnuméraires pour lesquels aucun investissement n’est d’ailleurs plus consenti depuis des années ? Vers quel dimensionnement de réseau s’oriente-t-on à trois, cinq  ou dix ans ? Voici de bonnes questions qu’il urge de se poser et auxquelles il urge plus encore d’obtenir des réponses.

Les cadres et notamment leurs représentants de la CFE-CGC doivent se faire un devoir de réfléchir à ces évolutions imminentes et lourdes de conséquences. N’ayant pas le pouvoir d’enrayer cette “4ème révolution industrielle”, comme on l’appelle dans les milieux autorisés, ils sont néanmoins appelés à s’impliquer dans la gestion humaine de ces enjeux dévastateurs pour l’emploi. Nous reviendrons, soyez-en certains, régulièrement sur ce sujet capital.

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