L’agence de demain
Le 23 juin dernier, nous évoquions dans un article au titre limpide, “Les enjeux de la digitalisation chez Adecco”, la tendance lourde et générale des grandes entreprises (et mêmes des moins grandes) à miser sur une digitalisation la plus poussée possible de leur activité. Nous notions que si notre concurrent Randstad a été le premier à abattre ses cartes sur le sujet, c’est bien l’ensemble de la profession qui devait y travailler d’arrache-pied depuis un certain temps et notamment Adecco et Manpower, les deux autres principaux acteurs de la profession.
Dans sa lettre du 1er septembre, le PDG Adecco France confirme nos intuitions et nous en dit un peu plus sur les ambitieux projets du groupe en la matière. Au “Service de recrutement 100% en ligne pour les TPE et PME” de Randstad Adecco oppose l’expérimentation d’une “agence en ligne full digital“. Pas besoin de bénéficier d’un score élevé au TOEIC d’anglais pour comprendre que ces agences digitales seront entièrement gérées du bout des doigts, sur un clavier ou une tablette. Plus de pas-de-porte, plus de loyer et surtout un minimum de salariés…
L’entreprise annonce par ailleurs un renouvellement de partenariat de trois ans avec TalentToDay. Il suffit d’effectuer une rapide visite du site en question pour comprendre que la fonction recrutement va connaitre, à court terme, une mutation sans précédent, similaire à celle du secteur bancaire, des assurances ou des agences de voyage dont les sites ont fermé par centaines Les conséquences en matière d’emploi sont aujourd’hui incalculables et nos dirigeants escomptent un retour sur investissement rapide et massif qui se réalisera, qui peut en douter, sur la masse salariale supprimée. Lisez, relisez attentivement la lettre de notre PDG : presque tout y est écrit et ce qui ne l’est pas est largement suggéré.
Cerise sur le gâteau, le groupe se dote, en France, d’un Directeur Digital, Marketing et Communication dont la mission devrait consister, en substance, à accompagner les dirigeants du groupe et nos clients sur la révolution numérique en cours, à apporter des “briques de valeur” digitales dans les services apportés à nos clients, notamment dans les domaines de l’évaluation (comme évoqué plus haut, voir le site TalentToDay) et de la communication et aussi accélérer la digitalisation de nos processus. Ce dernier objectif s’inscrivant dans le projet Peps prétend simplifier les tâches inhérentes au métier et contribuer à une meilleure organisation. Voici qui rassurera, fera sourire ou grincer les dents à tous nos collègues des agences, à bout de nerf, noyés, submergés par l’avalanche des procédures, chiffres, reports divers et variés qui leur sont imposés et dont l’inflation rend tout simplement impossible l’exécution de leur métier, de la fonction mentionnée sur leur contrat de travail. Voici plus de quinze années que sont évoqués la simplification des tâches, l’allègement des procédures, le recentrage sur le métier et autres pieuses intentions tandis que s’alourdit sans cesse la charge de travail. On  aimerait y croire cette fois…

L’entreprise a donc décidé de se lancer à marche forcée dans la grande surenchère concurrentielle de la digitalisation de notre profession, sujet de la plus haute importance, notamment par les suppressions d’emplois qu’il préfigure et le bouleversement des façons de travailler. Faut-il s’en réjouir ou s’en inquiéter ? L’évolution des effectifs, la charge et la satisfaction au travail constitueront, n’en doutons pas, les seuls marqueurs fiables d’évaluation de la situation.

Jeudi sur ce blogue :
Allons-nous vers un nouveau plan social ? 

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