Le pactole, puis ceinture ? Les personnes
quittant leur emploi avec un gros « chèque de départ » risquent de voir
s’allonger le délai de carence appliqué avant de toucher leurs
allocations chômage. Alors que les partenaires sociaux reprennent jeudi
prochain la négociation Unédic, le patronat en fait une piste
privilégiée d’économies pour soulager le régime, confronté à une dette
record de 18 milliards d’euros. 

Aujourd’hui,
le « différé spécifique » en place pour les personnes ayant perçu des
indemnités supra-légales de licenciement est plafonné à 75 jours (lire
ci-contre). Le Medef veut supprimer ce plafond tout en modifiant la
formule de calcul de la durée du différé, qui est fonction de la somme
perçue et du niveau de la future allocation. La réforme qu’il propose
réduirait le différé pour les personnes parties avec des chèques
représentant peu de mois de salaire, mais l’allongerait, parfois très
fortement, pour les autres. Les économies liées sont estimées à
400 millions d’euros les deux premières années, puis 250 millions par an
en rythme de croisière.
Ce
serait une manière de mettre plus à contribution les cadres supérieurs
sans avoir à baisser le plafond des allocations chômage (6.100 euros).
Cette dernière option, parfois évoquée, est violemment combattue par la
CGC et entraînerait moins d’économies, très peu de chômeurs atteignant
ce plafond.

Les cadres premiers visés

Pour
les cadres, un nouvel effort centré sur le différé n’en aurait pas
moins un goût amer dans la mesure où leur contribution au régime est
déjà largement positive : ils versent 39 % des cotisations et, moins
nombreux au chômage, ne touchent « que » 18 % des allocations. « Les
cadres sont deux fois moins au chômage que les autres et leur retour à
l’emploi est plus rapide. L’effort qui leur est demandé est une question
de solidarité »
, rétorque-t-on au Medef.
Le
déplafonnement a d’autant plus de chances de voir le jour qu’il a les
faveurs de l’autre gestionnaire clef de l’Unédic, la CFDT, qui propose
elle aussi une nouvelle formule de calcul du « différé spécifique »,
différente de celle du Medef. Avec la réforme proposée par la centrale
réformiste, le futur niveau d’allocation n’entrerait plus en compte pour
le calcul du différé et le délai de carence serait supérieur à 75 jours
à partir de 12.000 euros d’indemnités supra-légales, inférieur en deçà.
A la clef, environ 250 millions d’euros d’économies par an. « Ce nouveau mode de calcul ferait aussi beaucoup de gagnants parmi ceux partis avec peu », insiste la CFDT, qui y voit un moyen de « limiter l’utilisation abusive de ruptures de contrat avec de fortes indemnités, notamment à l’égard des seniors ».
La mesure fait toutefois grincer des dents les autres syndicats. FO et la CGT sont opposées à un tel « recul des droits. »
« Le différé est déjà assez long. Pour lutter contre les abus de ruptures conventionnelles, il faudrait plutôt les taxer », insiste la CGT. La CFTC ajoute qu’avec un déplafonnement du différé, « le
vrai gagnant ne sera pas l’Unedic mais l’entreprise, qui en profitera
pour réduire les indemnités supra-légales au motif de préserver les
futures allocations chômage du salarié ».

 
La CGC surveille elle aussi de
très près cette piste de réforme qui impacterait avant tout les cadres,
son cœur de cible. A ce stade, elle se dit prête à envisager un
relèvement du plafond des 75 jours, mais « en aucun cas sa
suppression. C’est un point dur, on ne signera pas un accord le
prévoyant. Les indemnités supra-légales ne sont pas un cadeau mais le
résultat du préjudice subi par le salarié »
, estime-t-elle.
Derek Perrotte
Source : Les Echos.fr

Demain :
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

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