Entré en vigueur le 1er janvier 2013 et supprimé en fin d’année 2018, puisque remplacé par des allègements de charges sur salaires, le CICE (Crédit d’Impôts pour la compétitivité et l’emploi) n’a visiblement, si l’on se réfère aux chiffres officiels, amélioré de manière significative ni la compétitivité, ni l’emploi. Les rares, ponctuelles et très limitées embellies sur l’emploi ne sont dues qu’à une conjoncture internationale porteuse ces dernières années. Dès 2014, une analyse intéressante parue dans L’Expansion avertissait déjà de l’inefficacité du dispositif. Un dispositif représentant quand même plus de 20 milliards d’euros par an, c’est-à-dire la moitié des aides versées aux entreprises en France chaque année (41 milliards d’euros). En 2017, une étude diffusée par un organisme tout ce qu’il y a d’officiel estimait à 100 000 seulement le nombre d’emplois sauvegardés ou créés. Or un calcul arithmétique permet de constater que ce pactole de 41 milliards d’euros, s’il était intégralement affecté à l’emploi, permettrait de créer 2,5 millions d’emplois rémunérés à 1 850 euros net par mois, soit nettement plus que le SMIC. Ce serait donc la fin du chômage de masse qui nous place dans le peloton de queue des pays européens.


Qui veut gagner des millions ?

Nous avons encore en mémoire les exhortations de Pierre Gattaz, président du MEDEF, jurant mordicus que l’allègement des charges, le crédit d’impôt et la libéralisation du droit du travail permettraient de créer des millions d’emplois. Souvenons-nous de la diffusion par cet organisme d’un pin’s affichant hardiment “Je m’engage à créer un million d’emplois”. En gros le message revenait à : démolissez le droit du travail, flexibilisez et précarisez à fond le travail, limitez les salaires et, cerise sur le gâteau, supprimez le SMIC et vous allez voir ce que vous allez voir ! Même plus besoin de traverser la rue pour trouver du taf !

On le sait aujourd’hui, l’essentiel du CICE a été affecté à l’amélioration des fonds de roulement, la restauration des marges et l’augmentation des dividendes versés aux actionnaires. Prenons l’exemple caricatural du groupe de distribution Casino, empochant 97 millions de CICE tout en réduisant à peu près du même montant ses frais de personnel et en majorant très fortement la rémunération des dirigeants. Tout comme le groupe Carrefour, par exemple.


200 millions d’euros par an pour combien d’emplois créés ou maintenus ?

Et chez Adecco, où sont passés les plus de 200 millions d’euros perçus chaque année au titre du CICE ? Dans l’emploi ? Cela se saurait. L’effectif stagne et surtout se précarise depuis plusieurs années tandis que se multiplient les départs plus ou moins volontaires. En 2019, les allègements de charges viendront se substituer à ce crédit d’impôt pour les salaires inférieurs à deux fois et demi le SMIC. Pourquoi d’ailleurs limiter d’ailleurs les aides à ce plafond ? Nos dirigeants politiques ne savent-ils pas que le développement de la robotisation et de la digitalisation contribuent au transfert du travail vers des emplois plus qualifiés et donc mieux rémunérés et qu’il convient par conséquent de ne pas les exclure d’une politique de soutien à l’emploi ?

Le véritable problème sinon scandale, c’est de continuer à “faire toujours plus de ce qui ne fonctionne pas”, selon une formule connue. Continuer à arroser de dizaines et de centaines de milliards les entreprises, sans aucun contrôle ni contrepartie en même temps que les chômeurs doivent rendre de plus en plus de comptes. Qui sont finalement les vrais assistés en France ?
Tout le monde s’accorde enfin mais un peu tard à reconnaitre que le CICE est un échec patent. Imaginé par une petit cercle de technocrates du “groupe de la Rotonde”, du nom du célèbre café dans lequel se retrouvaient nos brillants cerveaux – notre Président y tenait déjà table ouverte du temps où il œuvrait encore chez Rothschild –  le CICE meurt de sa belle mort après avoir englouti des centaines de milliards d’euros dilapidés sans aucun contrôle et en la quasi-absence de résultats.

Le CICE aura sans doute été, comme l’évoque le pourtant très révérencieux journal La Tribune, un véritable scandale d’État, sans doute l’un des plus grands de ces dernières décennies. Tous les rapports et analyses le confirment : il nous a coûté “un pognon de dingue” – au moins 110 milliards d’euros – et a considérablement appauvri le pays sans aucun résultat notable. Les allègements de charges pour 2019 ne sont hélas pas plus conditionnelles et l’actionnariat des grands groupes semble avoir encore de belles années devant lui…

4 Commentaires

  1. En France, on taxe les cigarettes, l'alcool, les produits de luxe et … le travail.
    Vous ne voyez pas le problème?

    Bien sur que baisser les charges ne résous pas tout immédiatement, mais il faudrait peut-être arrêter d'être aussi dogmatique (je mesure mes mots, car vous êtes loin d'être les pires en la matière).

  2. ça me dégoûte de savoir qu'Adecco a reçu autant d'argent sans nous en reverser une partie ! Les actionnaires ont été contents de nous voir trimer !

  3. En tous cas ils ne sont pas perdus pour tout le monde ! il y en a qui ont du bien se gaver pendant que tu rames pour faire ton budget

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